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Letras:Georges Brassens. Other. Les Radis.


Chacun sait qu'autrefois les femm's convaincues d'adultere
Se voyaient enfoncer dans un endroit qu'il me faut taire
Par modestie...
Un enorme radis.

Or quand j'etais tout gosse, un jour de foire en mon village,
J'eus la douleur de voir punir d'une epouse volage
La perfidie,
Au moyen du radis.

La malheureuse fut trainee sur la place publique
Par le cruel cornard arme du radis symbolique,
Ah ! sapristi,
Mes aieux quel radis !

Vers la pauvre martyre on vit courir les bonn's epouses
Qui, soit dit entre nous, de sa debauche etaient jalouses.
Je n'ai pas dit :
Jalouses du radis.

Si j'etais dans les rangs de cette avide et basse troupe,
C'est qu'a cette epoqu'-la j' n'avais encor' pas vu de croupe
Ni de radis,
Ca m'etait interdit.

Le cornard attendit que le forum fut noir de monde
Pour se mettre en devoir d'accomplir l'empal'ment immonde,
Lors il brandit
Le colossal radis.

La victime acceptait le chatiment avec noblesse,
Mais il faut convenir qu'elle serrait bien fort les fesses
Qui, du radis,
Allaient etre nanties.

Le cornard mit l' radis dans cet endroit qu'il me faut taire,
Ou les honnetes gens ne laissent entrer que des clysteres.
On applaudit
Les progres du radis.

La pampe du legume etait seule a present visible,
La plante etait allee jusqu'aux limites du possible,
On attendit
Les effets du radis.

Or, a l'etonnement du cornard et des gross's pecores
L'empalee enchantee criait : "Encore, encore, encore,
Hardi hardi,
Pousse le radis, dis !"

Ell' dit a pleine voix : "J' n'aurais pas cru qu'un tel supplice
Put en si peu de temps me procurer un tel delice !
Mais les radis
Menent en paradis !"

Ell' n'avait pas fini de chanter le panegyrique
Du legume en question que toutes les pecor's lubriques
Avaient bondi
Vers les champs de radis.

L'?il fou, l'ecume aux dents, ces furies se jeterent en meute
Dans les champs de radis qui devinrent des champs d'emeute.
Y en aura-t-y
Pour toutes, des radis ?

Ell's firent un desastre et laisserent loin derriere elles
Les ravages causes par les nuees de sauterelles.
Dans le pays,
Plus l'ombre d'un radis.

Beaucoup de maraichers constaterent qu'en certain nombre
Il leur manquait aussi des betterav's et des concombres
Rafles pardi
Comme de vils radis.

Tout le temps que dura cette manie contre nature,
Les innocents radis en vir'nt de vert's et de pas mures,
Pauvres radis,
Heros de tragedie.

Lasses d'etre enfonces dans cet endroit qu'il me faut taire,
Les plus intelligents de ces legumes mediterent.
Ils se sont dit :
"Cessons d'etre radis !"

Alors les maraichers semant des radis recolterent
Des melons, des choux-fleurs, des artichauts, des pomm's de terre
Et des orties,
Mais pas un seul radis.

A partir de ce jour, la bonne plante potagere
Devint dans le village une des denrees les plus cheres
Plus de radis
Pour les gagne-petit.

Cettain's pecor's futees dir'nt sans facons : "Nous, on s'en fiche
De cette penurie, on emploie le radis postiche
Qui garantit
Du manque de radis."

La mode du radis reduisant le nombre de meres
Qui donnaient au village une posterite, le maire,
Dans un edit
Prohiba le radis.

Un crieur annonca : "Toute femme prise a se mettre
Dans l'endroit reserve au clystere et au thermometre
Meme posti-
Che un semblant de radis

Sera livree aux mains d'une maitresse couturiere
Qui, sans aucun delai, lui faufilera le derriere
Pour interdi-
Re l'acces du radis."

Cette loi draconienne eut raison de l'usage louche
D'absorber le radis par d'autres voies que par la bouche,
Et le radis,
Le legume maudit,

Ne fut plus desormais l'instrument de basses man?uvres
Et n'entra plus que dans la composition des hors-d'?uvre
Qui, a midi,
Aiguisent l'appetit.